Marina.

Marina avançait dans les grandes rues de Aurion, cette grande ville aux nombreuses boutiques. The Underworld avait fait escale ici pour quelques heures, le temps de remplir un peu les cales. Et, évidemment, c'est Marina qui fut contrainte de s'en charger. Faire les magasins ne la dérangeait pas, bien au contraire. Mais devoir dépenser son propre argent pour nourrir de tels gloutons, elle ne supportait pas ! Mais Marina n'avait pas son mot à dire, et devait effectuer les ordres du capitaine sans discuter.

Au moins, Weston avait eu l'intelligence de ne pas la laisser partir seule : Ryu avait été désignée pour l'accompagner en ville. Quoiqu'elle ne lui était pas d'une grande utilité, la jeune femme ne se battant jamais sous sa forme Originelle, elle ne lui aurait pas été d'une grande aide en cas de combat... Mais bon, un peu de compagnie ne se refusait pas ! Surtout lorsque l'on n'a aucun sens de l'orientation... Et puis, c'était un bon moyen de faire connaissance avec elle.

Les deux jeunes femmes marchaient côte à côte. Même en cherchant bien, l'on ne trouverait aucune ressemblance physique entre elles : Marina était vêtue d'un petit corset blanc et d'une jolie jupe rose pâle, alors que Ryu avait opté pour ce petit genre garçonne qui lui allait si bien.
Elles passaient de boutiques en boutiques. Malgré les nombreuses réclamations de Ryu sur de nombreux objets en tout genre, Marina ne céda pas. Il s'agissait tout de même de son argent à elle ! Pas celui du capitaine, ou de l'équipage en général. Non, le siens ! Et son avarice n'arrangeait pas les choses...

Aussi, lorsqu'elle passait à côté de tous ces gens, Marina luttait pour ne pas voler. C'était si tentant toutes ces bourses, ces porte-monnaies et ces sacs à mains... Mais elle s'était promi de ne pas voler cette fois-ci, qu'elle était simplement là pour faire des emplettes et qu'elle resterait à sa place. Alors elle se contentait de serrer les dents et de continuer sa route comme si de rien n'était.

Lorsque Marina et Ryu passèrent devant une confiserie, elles restèrent scotchées à la vitrine. Tous ces bonbons, ces chocolats, etc. C'était vraiment le paradis pour deux gourmandes comme elles. Mais Marina ne voulait pas entrer, de peur d'être trop tentée par toutes ces jolies choses. Alors elle restait plantée là, à contempler les sucreries sans pouvoir en détacher le regard.

[Désolée pour cette monstrueuse attente \o/]

Aurion... une ville portuaire de taille respectable sans bâtiment particulier, ni personnage important. Certains disaient même que les pirates y trainaient jour et nuit. Pas très fréquentable comme endroit... surtout pour des riches.

Alors, me demanderez-vous ? Que pouvais-je bien faire ici à roder comme un clochard au milieu de tous ces travailleurs ? Pour être honnête, je n'en ai moi-même aucune idée. Peut être l'ennui avait-il été trop fort ce jour là pour me forcer à rester cloitré chez moi, qui sait... Il n'empêchait que, malgré la dangerosité de certaines rues, ces dernières étaient bondées. En quel honneur ? Sûrement pas pour moi : les pauvres n'aiment pas les nobles, et, de plus, j'avais mauvaise réputation dans le coin, faute d'avoir voulu économiser quelques pièces sur un repas dans un restaurant miteux plein de brutes en tout genre qui m'avaient dévisagé pendant tout le souper, comme si j'avais un Mimigal dans les cheveux.
Finalement, je supposai que le fruit de toute cette agitation n'était autre que ce soleil qui n'avait pas brillé depuis bien des jours.

Le soleil, je lui devais une fière chandelle. Plus il donnait de sien, moins les demoiselles pensaient à se vêtir. En d'autre termes, en ce moment, Aurion était un petit bout de paradis. Je pourrais d'ailleurs en profiter pour passer du bon temps en compagnie de jolies filles. Oh non, je n'allais pas les importuner par une si belle journée. Juste rester en compagnie de l'une d'elles pendant quelques heures me suffisait voyons.

Après quelques minutes de rêverie, je finis par apercevoir à une centaine de mètres de moi une boutique vendant des friandises en tout genre. Le lieu parfait pour trouver mon bonheur. Ne dit-on pas souvent que les femmes aiment les desserts ? Cliché sexiste ? Mais point du tout. La preuve : il y avait également quelques messieurs dans le coin... bien que mon attention était plutôt portée vers les deux dames qui venaient d'arriver...

« Marina... Je reviens »

La voix de Ryu la sortit de ses pensées. La jeune femme se détourna du magasin et se dirigea vers un homme un peu plus loin. Un noble. Aucun doute là dessus. Ses vêtements raffinés et son allure supérieure le trahissaient. Marina se surprit à le jalouser : Elle aussi autrefois portait de si beaux vêtements ! Elle aussi avait été élevée dans la bourgeoisie avec toutes ses manières ! Elle aussi avait eut la chance d'être noble. Noble de la pire ville qui puisse exister, mais noble tout de même ! Mais elle avait tout perdu et était à présent condamnée à moisir sur un bateau. Bon, ce navire là, au moins, était plutôt bien réputé. Elle aurait pu tomber plus bas.

Marina eut beaucoup de mal à détacher son regard du beau jeune homme. Il était vraiment beau, c'est vrai, et Marina aimait beaucoup les jolis garçons... Mais ce n'était vraiment pas le moment de penser à ça. Elle devait faire les courses et se dépêcher de rentrer. Il valait mieux ne pas traîner, au risque de s'attirer les foudres du capitaine. Ce n'était pas que Weston lui faisait peur - ou juste un petit peu - mais elle ne voulait pas le mettre en colère et risquer de se faire punir par quelques moyens qui soient. Alors elle se retourna et se remit à contempler la vitrine, comme si de rien n'était. Elle se sentait rougir, et elle n'aimait pas ça. Elle n'avait plus de plaisir à regarder les pâtisseries, elle était trop tendue, perturbée et gênée.

Mais qui disait noble, disait forcément argent. Et Marina aimait l'argent, plus que tout au monde. Seulement, elle s'était promis de ne pas voler, pas ce jour là. Elle était simplement venue faire les courses avec Ryu, rien de plus. Mais après tout, un noble possédait tant de richesses... Une bourse de plus ou de moins, il ne verrait pas la différence... Si ?

« Je peux savoir pourquoi tu nous regardes ? »

Marina se crispa. Ryu s'adressait à l'homme avait si peu de tact et de tenue. Elle était soit inconsciente soit elle manquait cruellement de jugeote. La cuisinière se mit à sourire. La question de sa camarade l'avait énormément surprise, mais aussi beaucoup amusée. Elle cacha son fou rire derrière sa main, elle était tellement tendue qu'elle ne pouvait plus s'empêcher de rire...

J'aurais pu rester des heures entières juste à regarder les deux créatures qui venaient d'atterrir devant moi. J'avais l'habitude de regarder fixement les gens qui m'intriguaient, ce qui d'ailleurs leur déplaisait fortement. C'était devenu comme une maladie, voire une addiction puisque je ne voyais pas l'intérêt d'arrêter et que cela faisait s’accélérer le temps. Car non, la vie de noble était loin d'être aussi amusante que la décrivaient les contes de fées. La plupart du temps, on restait à lambiner dans un coin de notre demeure, n'ayant rien de mieux à faire.

Marina... je reviens.

Repéré. La voix de l'une des jeunes filles que j'observais depuis leur venue m'avait remarqué et avançait vers moi d'un air énervé. Quand elles faisaient cette tête, en général, il fallait mieux les laisser tranquille. J'étais peut être tombée sur une paranoïaque qui attendait la moindre occasion pour me gifler... Pauvre de moi...
Pourtant, je ne bougeai pas et mon petit sourire en coin resta figé comme si de rien n'était. Chose qui dut la mettre plus en rogne qu'elle ne l'était déjà en fait. Elle se planta finalement devant moi. Son air renfrogné se calma, son visage devint aussi placide que le mien. Je manquai de soupirer de soulagement. Elle me demanda par la suite, le plus simplement possible :

Je peux savoir pourquoi tu nous regarde ?

Oh. Ainsi, ce n'était que ça. Moi qui avait craint de me faire envoyer balader. Non, juste une gentille petit question. Enfin... gentille.... ce manque de tact aurait pu lui coûter la vie si elle l'avait posée à un autre que moi. De plus, je ne suis pas sûre que je l'aurais laissée user de ce ton si sa camarade et elle n'avaient pas été aussi ravissantes : j’avais devant moi deux sortes de demoiselles. Le garçon manqué, qui ne se cassait pas la tête pour essayer de marcher gracieusement et s’habillait de façon pratique : ou celle qui venait de m’adresser la parole ; puis l’autre, qui était restée à l’écart. Celle-ci était bien plus féminine que son amie, aucun doute possible. On le voyait facilement à son allure, à ses vêtements, ou encore à son visage, un peu plus enfantin.
Je remarquai soudainement que, non seulement je n’avais pas répondu à la question de la miss sous mes yeux, mais que je les avais dévisagées trop longtemps. Je repris mes esprits en un instant. Il fallait briser ce silence, qui commençait à devenir louche, et vite.

Je tiens à m’excuser si je vous ai peinée mademoiselle. Mais mon intention en vous observant vous et votre charmante amie n’était point de vous agacer ou encore moins de vous nuire. Je pensais juste vous observer discrètement; seulement, à cause de votre perspicacité, mon plan a lamentablement échoué.

Beau rattrapage. Mi-mensonge, mi-vérité, avec un peu de chance, mon alibi serait accepté.

« Je comprends bien, mais pourquoi ? On n'a rien de spécial que je sache. De plus d'après tes vêtements tu es un noble et que ferais un noble ici à Aurion une ville pirate ? »

Voilà qu'elle recommençait. Marina se tourna vers la jeune femme, les yeux grands ouverts. Elle lui implorait de se taire, mais Ryu semblait complètement l'ignorer. L'homme en face d'elles ne semblaient pas offensé par son attitude, mais Marina était tout de même gênée : Et s'il découvrait qu'elles étaient elles mêmes des pirates ? Que leur ferait-il ? Irait-il prévenir les autorités ? L'équipage serait bien embêté sans elles. L'idée de voir un des hommes de The Underworld à sa place, en cuisine, lui donnait terriblement envie de rire. Comme à son habitude, Marina était si tendue qu'elle s'était mise à rire aux éclats alors que ce n'était vraiment pas le moment.
Toujours hilare, la cuisinière tourna la tête, essayant tant bien que mal de cacher son fou rire.

« Marina dit quelque chose au lieu de rigoler ! » rouspéta la navigatrice.

Aussitôt, Marina cessa de rire. Elle n'en avait plus du tout l'envie. Ryu l'avait insitée à parler, mais pour une fille de nature très timide, ce n'était vraiment pas une bonne idée. La jeune femme se mit à rougir, terriblement gênée. Elle baissa la tête.

« Je... Tu... Nous devrions peut-être y aller. Nous avons encore des choses à acheter et il ne nous reste plus beaucoup de temps avant que... »

Elle n'acheva pas sa phrase. Son regard venait de se poser sur un petit objet à la ceinture de l'homme. Les yeux écarquillés, elle scrutait la bourse, comme hypnotisée. Cette petite chose devait contenir tant de jolies pièces... Rien que le tissus semblait doux et délicat, ce qui l'attira davantage encore.
Mais elle se ressaisit. Non, elle ne devait pas faire ça, elle se l'était promit en quittant le navire quelques heures plus tôt. Marina releva vivement la tête, quittant la petite escarcelle du regard avec beaucoup de peine. Elle croisa aussitôt le regard écarlate du noble et se sentit rougir de nouveau. A ce moment là, elle se sentait si gênée qu'elle aurait voulu s'enfuir et disparaître à tout jamais. Mais elle se contenta de tourner la tête et de regarder Ryu, la suppliant silencieusement de partir.

Suite à mon excuse, la jeune femme sembla dubitative. Certes, il y avait de quoi se poser des questions lorsqu'un homme vous avouait qu'il vous observait "discrètement" depuis quelques minutes. C'était même plus que louche : je connaissais plus d'une personne qui aurait couru chercher l'armée après une telle déclaration. Cependant, je restai confiant. J'avais bien compris que les demoiselles près de moi n'étaient pas faites de ce bois là. Elles étaient bien plus dures à cuir qu'elles n'en avaient l'air. On ne tarda pas à me ramener à la raison en me questionnant à nouveau.

Je comprends bien, mais pourquoi ? On n'a rien de spécial que je sache. De plus d'après tes vêtements tu es un noble et que ferais un noble ici à Aurion une ville pirate ?

Aurais-je mal fait de venir à Aurion dans une tenue décontractée ? Évidemment, j'avais déjà prévu que mes vêtements attireraient l'attention de plus d'un passant; mais je me voyais mal me costumer dans mes vieilles chemises tachées sous le prétexte de vouloir me fondre dans la masse... Même si je devais pour cela risquer de me faire dérober les quelques pièces que j'avais apportées au cas où. En y réfléchissant bien, j'avais de grandes chances que cela se produise puisque, comme l'avait dit ma charmante interlocutrice, il y avait de grandes chances que la ville soit contrôlée par les Pirates, d'après leur nombre dans les parages. Peut être d'ailleurs ces deux-là faisaient partie d'un équipage... et cela m'importait peu. Elles n'avaient pas l'air vraiment dangereuses...

Je m'apprêtais à répondre tout ce que je venais de réciter en mon fort intérieur quand mon attention fut retenue par la deuxième fille, la dénommée "Marina", il me semblait. Celle-ci riait aux éclats, à ma grande surprise. Elle qui, il y avait quelques secondes à peine, était gênée par la conduite de son amie envers moi. Cette dernière, visiblement vexée d'être l'objet d'une telle moquerie, grogna :

Marina, dis quelque chose au lieu de rigoler !

Je dois bien avouer que, dans cette situation, j'avais moi-même peine à me retenir de rire. Je tins bon jusqu'à que "Marina" se calme. Suite au sermon de sa camarade, l'envie de glousser s'envola. Elle semblait à présent plus grave. Les rôles s'inversaient : c'était à présent elle qui souhaitait prendre congé de moi. L'air peiné, rougissant, elle bégaya :

Je... Tu... Nous devrions peut-être y aller. Nous avons encore des choses à acheter et il ne nous reste plus beaucoup de temps avant que...

Elle stoppa net en plein milieu de sa phrase. Avait-elle un souci ? Peut-être avait-elle simplement oublié ce qu’elle avait à faire… c’est ce que j’aurais pensé si je n’avais pas remarqué son regard posé droit sur la bourse pleine à craquer que je portais à la ceinture. Après tout, quel prolétaire ne serait pas impressionné par cette somme gigantuesque ? Malgré tout, elle réussit avec peine à détourner les yeux. Elle me tourna le dos et fit quelques pas… avant de s’arrêter, pour attendre son amie. Je devais profiter de ce moment de silence pour intervenir et les retenir.

Voyons ! Vous n’allez pas déjà partir ! Vous n’avez pas de navire à emprunter, je me trompe ? Restez un peu en ma compagnie, il y a bien plus à voir en ces lieux que de bêtes boutiques ♪

Bien que constamment souriant, je n’étais pas pour autant confiant. Dans ce cas, justement, je craignais fort que les deux s’en aillent sans même m’avoir écouté. D’après mon expérience, il arrivait souvent que l’on me prenne pour un pervers quand je disais de telle chose… la raison m’échappe toujours…